Mais qu’allait donc faire la présidente de la Commission dans cette jonque ?

Se comportant à nouveau comme un doux enfant de chœur, après s’être déconsidéré en multipliant ses démarches naïves auprès du dictateur Poutine, Monsieur Macron poursuit ses initiatives intempestives en sollicitant les « bons offices » du dictateur Xi Jinping, qu’il contribue ainsi à ériger en arbitre suprême, sans pouvoir espérer la moindre efficacité, ni disposer ce faisant d’autre mandat que, semble-t-il, sa volonté de se faire un nom dans l’Histoire.

Ainsi, du reste, que Monsieur Scholz lorsqu’en janvier dernier il s’était rendu en Amérique du Sud, il se comporte comme s’il était au moins ministre des Affaires étrangères de l’Union européenne. Il ne dispose cependant d’aucune légitimité pour définir la politique étrangère de l’UE. Monsieur Macron est seulement président de la République française, fonction dont l’usage aurait consacré sa prééminence en matière de politique étrangère française. Il ne peut se prévaloir d’aucune légitimité démocratique au niveau européen, pas plus, du reste, en cette matière qu’en d’autres. Au Conseil européen (des chefs de gouvernements), au titre de représentant du gouvernement français, il n’est que Unus inter pares. Comme également Monsieur Scholz quand il cherche à bloquer la politique de transition énergétique de l’Union au profit assez improbable de la fraction la plus rétrograde de l’industrie automobile Allemande.

Il est regrettable que la présidente de la Commission se soit laissée, sans mandat, si imprudemment entraîner et instrumentaliser dans cette aventure à haut risque, démarche qualifiée de « visite d’État » ? De quel État, d’État européen ? Ou bien fait-elle partie du gouvernement français ? Par ailleurs, la politique étrangère de l’UE n’est-elle pas le domaine du Haut représentant Borrell ? Il est urgent de mettre un peu d’ordre dans la pétaudière. L’UE a besoin, entre autres, d’une politique étrangère commune et unique.

En dépit d’interprétations abusives mais fréquentes, au sein du collège des Commissaires, dont le fonctionnement est collégial comme son nom l’indique, outre une fonction de représentation (de la Commission), la présidente organise et anime les débats. Mais elle ne dispose pas d’une autorité supérieure. Les traités intergouvernementaux (internationaux) qui continuent de régir le fonctionnement de l’UE ne lui accordent aucun autre rôle. Certaines compétences régaliennes doivent désormais s’exercer au niveau européen.

Il ne suffit pas de répéter inlassablement que « l’Europe doit être souveraine, et démocratique ». La souveraineté ne prend de sens que si l’Union se voit accorder les compétences correspondantes. Ce qui rappelle que la souveraineté ne vaut pas seulement vis à vis des puissances étrangères, mais aussi de ses États membres. Quant à la démocratie, il est insensé de la proclamer tant que le fonctionnement interne de l’UE n’est pas organisé par une constitution, une vraie, démocratique, que seuls peuvent lui accorder ses citoyens.

Depuis le 9 mai 1950, il y a soixante-treize ans, nous attendons cette évolution. Depuis soixante-treize ans, l’on va répétant que c’est prématuré, que le sujet n’est pas encore mûr. Combien de temps, combien de mandatures du Parlement européen devrons-nous encore attendre pour qu’il se saisisse enfin de ce rôle, un rôle qui lui revient de droit ? À quand un « Serment du Jeu de Paume » européen ? Combien de temps céderons-nous à la peur des mouvements nationalistes extrêmes ? Cela ira-t-il mieux demain ? Quand ? Combien de temps continuerons-nous d’accepter la tyrannie anti-démocratique de traités intergouvernementaux (internationaux) qu’inconsidérément certains proposent à nouveau d’amender, au nom d’une interprétation superficielle de la Conférence sur l’avenir de l’Europe : sérieusement, pourquoi les gouvernements des États membres accepteraient-ils de se départir de leur droit de veto ? Exigeons immédiatement l’avènement ultime de la démocratie au niveau européen ! Ne nous laissons pas proposer comme en 2004 le projet d’une fausse constitution sous la forme d’un traité international. Aucune constitution démocratique n’a jamais, nulle part, été établie par un traité international.

Lorsque l’Union sera démocratique, il existera enfin un espace et un débat politique européens vivants et de vrais partis politiques européens.

7 avril 2023

N.B. Une version un peu plus ancienne de cet article a été publiée le 14 avril 2023 par Sauvons l’Europe.

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